Studios de Musique
La société Chut’ on vous écoute voulait un espace qui lui ressemble, entièrement consacré à la création sonore. Pour donner vie à cette ambition, j'ai imaginé un lieu sur mesure, niché au cœur d’un ancien atelier du Pré-Saint-Gervais.
La création sonore nécessite des aménagements très spécifiques. Dans une ville aussi dense que Paris, où chaque espace est exploité, il devient difficile de trouver des surfaces adaptables à ce type d’activité. Désireux de s’installer dans un lieu pérenne conçu pour leur projet, les trois cofondateurs du studio Chut’ on vous écoute ont fait l’acquisition en 2021 d’un hangar à rénover, implanté au cœur d’un îlot du Pré- Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis). Le bâtiment offrait un fort potentiel volumétrique.
Travailler sur des constructions aussi brutes est incroyablement stimulant, car tout reste à inventer en préservant l’âme du lieu. Le projet étant situé à proximité d’une église classée, il devait obtenir l’aval de l’ABF. De plus, les recommandations des acousticiens ont dû être intégrées pour produire des plans techniques précis, destinés aux entreprises chargées des travaux. Un défi complexe, mais exaltant.
Insonorisation et capacités structurelles:
J'ai reçu carte blanche pour redonner vie à cet ancien atelier de réparation de moteurs d’avion. La feuille de route était assez simple : trois studios de composition, un auditorium Atmos (cabine avec un son en immersion globale), une cabine speak (voix off), une live room (enregistrement multi-instruments), des bureaux, un espace extérieur et un lieu de vie propice aux échanges créatifs et aux réunions informelles. Mais derrière cette commande pointe un enjeu de taille, l’insonorisation impliquait une refonte structurelle du bâtiment. Les studios sonores génèrent des charges considérables en raison de l’isolation constructive.
Nous avons dû renforcer les fondations en sous-œuvre, en béton, jusqu’à 3 m de profondeur. Il a également fallu consolider l’édifice pour créer une dalle d’étage. Les studios ont été conçus selon le principe de la boîte dans la boîte. A l’intérieur d’une structure principale en maçonnerie lourde, une enveloppe en plaque de plâtre a été installée, créant un espace isolé du monde extérieur. Entre ces deux parois, un isolant en mousse anti-vibratile, recouvrant toutes les parois, du sol au plafond, absorbe les moindres vibrations. Ce dispositif, essentiel à l’acoustique du lieu, reste visible à travers les surfaces vitrées, légèrement inclinées contre la propagation des ondes, qui relient visuellement les studios. Pour faire entrer un maximum de lumière dans cet espace autrefois confiné, le plan s’organise autour d’un atrium central à double hauteur, traversé par une verrière zénithale.
Ce volume au cœur du projet dessert les studios au rez-de-chaussée, où un sol en tomettes évoque la convivialité d’une place semi-publique.
A l’étage, l’ambiance se fait plus domestique avec un parquet en chêne massif et une cuisine idéale pour se retrouver et échanger autour d’un bar en marbre de Carrare, lui-même posé sur un socle revêtu de tomettes. En partie supérieure, se trouvent un grand bureau vitré, un studio et une salle de réunion pouvant fusionner avec l’espace de la restauration grâce à des baies coulissantes. Une partie de la toiture a été évidée pour dégager une terrasse. La déambulation peut s’opérer en boucle entre tous ces espaces, autour du vide central. La structure métallique, conservée et peinte en noir, n’a plus de rôle porteur ; elle reste néanmoins un élément clé du projet, préservant l’âme et la mémoire du lieu. Le bois de chêne règne en maître dans cet espace où chaque détail a son importance : dans les studios, les rangements se parent de portes en cannage pour absorber les résonances, tandis que les coffres de la salle de réunion servent à la fois de rangement et de banquettes confortables. L’ensemble, intemporel et fonctionnel, s’adapte naturellement aux besoins des salariés et des clients, tout en laissant la porte ouverte à d’autres usages. Est-on dans un studio de musique, un atelier de conception ?
Peu importe le qualificatif, l’énergie créative habite ce foyer.