Muée par la seule conviction que l’architecture peut et doit se faire sur n’importe quel territoire mais aussi par l’envie de retrouver de la sensibilité et de la proximité dans les rapports humains qui composent un projet, c’est en 2010 que je quitte Paris pour fonder en Ardèche, au cœur de la cité d’Aubenas - 12 000 habitants et presque autant de chèvres – ma propre agence d’architecture avec mon indissociable associé, Thibaut Dutriez, rencontré à l’ENSA Paris Val de Seine, dix ans auparavant. Le territoire ardéchois pose nombre de problématiques architecturales qui suffisent à créer une motivation sourde dans chacun de nos gestes pour que les choses bougent et évoluent, et pourquoi pas au même rythme qu’à la ville. Rapidement, la commande publique s’impose dans la majeure partie de mon travail, car c’est précisément elle qui véhicule l’image que je souhaite donner de l’architecture : un choix de société. Une société rurale, où l’échelle d’intervention est souvent minimaliste, où les accroches seront plus souvent le paysage que le bâti, où les projets donnent souvent lieu à beaucoup de mixité, programmatique ou sociale. Intervenir dans la commande publique en milieu rural, c’est développer du territoire, des pratiques, des échanges, mettre en valeur un patrimoine souvent très riche et oublié, c’est créer du lien social. Ma mission ne s’arrête pas au bâtiment, c’est un véritable travail de suivi, de confiance, de proximité que je développe sur chacun de mes projets, de nos projets. Ce sont souvent les échanges avec les anciens, les locaux, qui guident le geste. Celui de prolonger les habitudes et les traditions régionales, sans pastiche, en s’inspirant de l’avant et de l’après. Ici, l’architecture environnementale prend sens au-delà des prescriptions règlementaires, car c’est toute la filière locale - personnes, matériaux, savoir-faire - que je tente de faire intervenir et de développer à chaque intervention. C’est la vision de l’architecture que j’aime et que je souhaite partager aujourd’hui en présentant à travers une sélection de mes projets, ma candidature aux concours des femmes architectes. Pour que l’architecture, même rurale, « s’ancre dans la vie des français ». Agathe Esteve