ANNE TERRIER
Si les perspectives toutes tracées sont l’apanage de l’architecte et du devin, elle les doit plus aux œuvres de sa main qu’à l’action du destin. La fondatrice de l’Atelier ANN-T, pour qui coller à l’identité du projet implique de ne jamais copier à l’identique, assure le même sur-mesure en étirant d’importantes résidences ou en réalisant une extension d’une maison individuelle.
Anne ne connaît pas la panne pour « faire jaillir le sentiment » d’un lieu : un banc à l’acier grésillant d’un rouge électrique vient ici égayer un hall et sa nature austère ; des bois classés immiscent là leurs troncs de bouleau sur l’initiative de l’entrepreneuse, qui l’abat au stère. Quant à ce « discours urbain » qu’elle façonne avec les confrères, il dépasse les postures de façade lorsqu’arrive le moment de bûcher sur celle des constructions.
L’architecture acquière en texture à chaque pas effectué pour « rentrer dans le dossier », et aboutir à cette simplicité chère aux horlogers : « Je pousse la technique à son terme ; c’est très important pour moi. »
Native de Franche-Comté et grâce à dix ans d’une besogne étagée sans vergogne, la Lyonnaise d’adoption visite toutes les îles composant l’archipel du métier d’architecte : d’abord au dessin, puis à la tête de ses bonnes mines, et chef de projet enfin.
Outre les partenaires fidélisés pour sa compétence et son obligeance, la recommandation rameuta rapidement des caractères dont le fameux promoteur Monsieur Devillers est sans doute le plus flamboyant exemplaire. L’architecte s’est démenée pour lui déposer un permis sous trente jours, s’accorder au diapason des réglementations martiniquaises et planter son drapeau à Fort-de-France. Pour celle chez qui le cadastre ne se lit pas avec la légèreté réservée à la carte des astres, le respect de la profession s’est remporté par une opiniâtreté à l’épreuve de la rentabilité. Autant de succès nourrissant la réputation de son atelier pensé pour ne pas se retrancher dans les certitudes, dont Anne avait prévu les agrandissements dès les frémissements.
La chef d’entreprise se préserve cependant de se borner aux tables de restaurant qui l’éloigneraient des édifices à instaurer ou restaurer : « Je ne veux pas perdre mon contact avec les plans et la conception au profit du pur relationnel ou du management. J’ai envie d’être sur la planche à dessin, d’y consacrer mon temps, et d’inculquer mon savoir opérationnel aux jeunes. Je pourrais supporter de retourner au salariat, de descendre en grade, mais pas d’arrêter l’exercice de l’architecture. »
La dirigeante remplit le cahier des charges en puisant dans ceux de sociologie, et en applique les enseignements aux dilemmes du logis. Un remède à la rengaine de ceux qui dégainent le diptyque « baies vitrées et piscines attitrées » à la moindre occasion de flamber.
Certains tenteraient peut-être d’entraver la liberté d’Anne Terrier, par des conseils peu avisés qui ricochent contre sa propension à poursuivre jusqu’au bout ce qu’elle a commencé. « Anne, tu vas devoir t’associer pour continuer à progresser », scandent les uns, mais l’entrepreneuse qui n’est pas du genre à cocher mécaniquement les cases préfère attendre la perle rare avec qui l’affinité s’embrase.
LE CERCLE DE ZAHA
Anne Terrier est membre de l’association Le Cercle de Zaha depuis 2018, elle fait notamment partie de la mission Solidarité Jeunesse dont le but est de sensibiliser les jeunes femmes aux métiers du bâtiment. Dans cette optique des rencontres sont organisées dans des collèges, lycées, IUT, BTS, dont l’objectif est de confirmer la légitimité des femmes dans ce secteur, rompre le silence sur les situations d’inégalité, renforcer le réflexe d’égalité femme-homme et encourager la bienveillance, l’audace personnelle et professionnelle, l’envie et le partage.
Créé à Lyon en 2013, le Cercle de Zaha réunit des femmes dirigeantes du secteur de l’architecture, de la construction et du paysage. Des femmes de talent et d’horizons multiples qui s’inscrivent dans l’esprit libre et original de Zaha Hadid.
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